Des dirigeants du monde entier ont appelé dimanche à la retenue après l’attaque massive et sans précédent menée dans la nuit par l’Iran contre Israël avec des centaines de drones et de missiles, qui fait craindre un embrasement régional.
Israël est resté en état d’alerte, affirmant avoir « déjoué » cette opération. Il s’agit de la première attaque directe jamais menée par l’Iran contre le territoire israélien, déclenchée en riposte à une frappe contre le consulat d’Iran à Damas 1er avril, imputée à Israël.
Les Etats-Unis ne veulent ni d’une « escalade » ni d’une « guerre étendue avec l’Iran », a averti dimanche un porte-parole de la Maison Blanche, John Kirby. Le président américain Joe Biden avait auparavant renouvelé son soutien « inébranlable » à Israël.
Cette attaque est intervenue plus de six mois après le début de l’offensive menée par Israël dans la bande de Gaza contre le Hamas palestinien, allié de l’Iran, qui a encore accru les tensions entre les deux pays ennemis.
Le chef des forces armées iraniennes, Mohammad Bagheri, a salué une attaque qui « a atteint tous ses objectifs ». Le président Ebrahim Raïssi a déclaré que la « punition de l’agresseur s’est réalisée », prévenant Israël que toute riposte « imprudente » donnerait lieu à une réponse militaire beaucoup « plus forte ».
« La campagne n’est pas encore terminée, nous devons rester en état d’alerte », a affirmé de son côté le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant. « Avec les Etats-Unis et d’autres partenaires, nous avons réussi à défendre le territoire de l’Etat d’Israël », a-t-il ajouté.
99% des tirs interceptés
« Nous avons intercepté 99% des tirs vers Israël », a affirmé dimanche le porte-parole de l’armée israélienne, le contre-amiral Daniel Hagari. Israël a annoncé la réouverture dimanche matin de son espace aérien, de même que la Jordanie et le Liban, voisins d’Israël, et l’Irak, frontalier de l’Iran.
A la demande d’Israël, le Conseil de sécurité de l’ONU va se réunir en urgence dimanche. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a condamné « une grave escalade », à l’instar de nombreux pays comme la France et l’Allemagne.
Le G7, réuni dimanche, a condamné « unanimement » l’attaque iranienne, appelé « toutes les parties » à la « retenue » et affirmé son « plein soutien » à Israël.
Parallèlement à cette attaque, des alliés de Téhéran, le Hezbollah libanais et les rebelles yéménites houthis, ont tiré des roquettes et des drones en direction du territoire israélien.
Une frappe israélienne a visé dimanche un site du Hezbollah dans l’est du Liban, selon une source du parti pro-iranien et l’armée israélienne.
Israël est depuis la révolution iranienne de 1979 l’ennemi juré de la République islamique, qui appelle à sa destruction. Mais jusqu’à présent, Téhéran s’était gardé d’attaquer frontalement Israël et les deux pays avaient l’habitude de s’affronter par tiers interposés, comme le Hezbollah.
L’attaque iranienne, baptisée « Promesse honnête », est une réponse à la frappe qui a détruit le 1er avril le consulat iranien à Damas et coûté la vie à sept membres des Gardiens de la révolution. L’Iran a accusé Israël, qui n’a ni confirmé ni démenti.
Peu avant 02h00 dimanche matin (23h00 GMT samedi), une série de détonations a figé Jérusalem, dont le ciel s’est parsemé de lumières rouges et jaunes.
Selon l’armée israélienne, l’Iran a « lancé un essaim de 300 drones tueurs, des missiles balistiques et des missiles de croisière ». Seuls quelques missiles balistiques « sont entrés et ont touché légèrement » une base militaire, qui reste en activité, a affirmé l’amiral Hagari, faisant état de plusieurs blessés légers ainsi qu’une fillette de 7 ans placée en soins intensifs.
L’agence iranienne Irna a fait état de « sérieux dégâts dans la plus importante base aérienne du Néguev », dans le sud d’Israël.
« Désamorcer la situation »
Dans la foulée, Téhéran a appelé les Etats-Unis à rester à l’écart du conflit. « Il s’agit d’un conflit entre l’Iran et le régime voyou israélien, dont les Etats-Unis DOIVENT RESTER À L’ECART! », a déclaré la mission iranienne à l’ONU sur X.
Téhéran a amené « en toute conscience » le Moyen-Orient « au bord du précipice », a accusé dimanche la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock.
L’Egypte a mis en garde contre un « risque d’expansion régionale du conflit », l’Arabie saoudite a appelé à « la plus grande retenue » et l’Irak « à ne pas étendre le conflit ».
Hors du monde arabe, le Premier ministre britannique Rishi Sunak a appelé au « calme » afin de « désamorcer » la situation. La Russie a également appelé à la « retenue ».
La France a recommandé à ses ressortissants de quitter temporairement l’Iran. Le pape François a lancé un « appel pressant » contre « une spirale de violence ».
Face aux condamnations occidentales, l’Iran a convoqué les ambassadeurs du Royaume-Uni, de France et d’Allemagne.
Plusieurs analystes jugeaient dimanche quasi inévitable une riposte d’Israël. Même s’il n’est pas dans l’intérêt du pays d’ouvrir un nouveau front contre l’Iran en pleine guerre contre le Hamas, selon Meir Litvak, directeur du centre d’études iraniennes de l’université de Tel-Aviv.
Avant de riposter, « il ne s’agit pas seulement de consulter, mais d’obtenir l’approbation de Washington », a assuré Tamir Hayman, ancien chef du renseignement militaire israélien.
« Pas d’accord humanitaire » à Gaza
La guerre se poursuit pendant ce temps dans la bande de Gaza, où le ministère de la Santé du Hamas a recensé dimanche 43 morts en 24 heures, portant à 33.729 le nombre de tués, en majorité des civils, dans les opérations militaires israéliennes.
La guerre a été déclenchée par une attaque sans précédent menée le 7 octobre dans le sud d’Israël par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza, qui a entraîné la mort de 1.170 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l’AFP à partir de données officielles israéliennes. Plus de 250 personnes ont été enlevées et 129 restent retenues à Gaza dont 34 sont mortes, d’après des responsables israéliens.
Le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, est classé groupe terroriste par Israël, les Etats-Unis et l’Union européenne.
Dimanche, le Mossad, le service de renseignement israélien, a publié un communiqué affirmant que le Hamas avait « rejeté les grandes lignes » du plan négocié en vue d’une trêve par le Qatar, l’Egypte et les Etats-Unis.
Le rejet de cette proposition montre que le chef du Hamas à Gaza, Yahya Sinouar, « ne veut pas d’accord humanitaire, ni le retour des otages », a déclaré le Mossad.